Je suis désolé de ne pas pouvoir donner 5 étoiles car l'emballage est excellent, mais ma copie présente un bruit fastidieux sur presque toutes les pistes qui n'est même pas disparu après une nettoyage. Peut-être un problème d'impression.

La fin des années 70'. Après des années de recherches avancées et des disques d'une grande importance historique, la popularité du Jazz libre semble avoir une pause. Archie Shepp, qui a été un porte-parole musical et un 'idéologue' de cette tendance, trouve refuge en Europe, un continent qui semblait être un havre de paix pour les jazzmen exilés dans les années 70'. A Copenhague, il rencontre la maison discographique Steeplechase et le pianiste Horace Parlan, ce qui le convainc de prendre un nouveau chemin : celui d'aborder des Spirituals américains traditionnels. Semblait quelque chose d'avant-gardiste pour un jazzman qui avait fait de l'iconoclasme sa poétique distinctive. Et en partie c'est vrai. Mais en partie non. Les impératifs sociaux que Archie a toujours défendus et qui caractérisaient son Jazz furieux ont en fin de compte la même racine dans ces chansons de libération qui aspirent à la liberté d'un peuple. Si on creuse la surface de beaucoup de musique Free Jazz, on retrouve la tradition, un lien avec le passé qui est loin d'avoir été coupé. Pensons au profond sens du Blues qui traverse l'œuvre de Ornette Coleman ou au Gospel réinterprété de 'Let us go into the house of Lord' par Pharaoah Sanders. Shepp s'était déjà approché du Gospel avec 'Cry of my people', mais pas d'une manière aussi philologique, structurée et profonde.
Archie revient à la maison. Parce qu'il y a toujours une maison où revenir. Et la vie est en fin de compte un voyage d'un exil à l'autre. Et ainsi la biographie de Shepp, exilé en Europe, se fond en mille rivières avec la nostalgie d'un peuple entier vers ses racines et la grande mère Afrique. Et si c'est vrai que le spiritual qui donne titre à cet album splendide est emprunté d'une thème de 'Sinfonia del nuovo mondo' par Dvorak, eh bien une autre nostalgie se faconne timidement à notre fenêtre : celle du compositeur bohémien vers sa patrie natale. Ciclique l'histoire et affascinante le monde de la musique et de l'art.
Archie Shepp dit avoir pleuré en enregistrant ce disque. On peut en être sûr. Il y a une intensité dans ce disque qui est vraiment inestimable. C'est un disque 'sentit', 'vécu'. On le sent à chaque seconde d'écoute.
Musicalement Shepp est contenue ; il n'y a pas de courses sassofonistiques à grande vitesse, ni même des 'assols' proprement dits, si ce n'est des variations mélodiques sur les thèmes et quelques divagations très mesurées. Comme d'habitude notre homme joue avec les sons, parfois étouffés, parfois gutturaux, mais toujours à la recherche d'un lyrisme torturé, ému et rigorosément au service de la chanson. Il est accompagné splendidement par Horace Parlan, qui probablement était le partenaire parfait avec son approche musicale et aérien.
Quand j'ai écouté ça me creva un vide intérieur profond. Je compris que c'était l'un de ces disques destinés à changer mon mode d'être. Et cela continue encore aujourd'hui.
Et chaque fois je retourne sur la voie de la maison.

Je ne savais pas que cet album existait ! Je l'associais toujours à 'Le Jazz Libre', dans le style de Albert Ayler, David Murray ou Anthony Braxton. L'écouter jouer ces spirituels est un agréable et incroyable expérience pour moi ! 4 étoiles car toutes les arrangements sont stylistiquement similaires, mais c'est toutefois très agréable, compte tenu de mon attente limitée quant à l'approche de Shepp en jazz.