Le printemps arabe décodé

Ce livre est le fruit d'une course effrénée entre le flux de l'information et les étapes de la réflexion. J'ai dû plusieurs fois reprendre des chapitres entiers car les marches des révoltes, sans aller dans le sens opposé de mes analyses, prenaient des directions qui nécessitaient des approfondissements et des nuances. L'enthousiasme qui accompagnait les révolutions en Tunisie, en Egypte et à Oman fut déçu par la résistance au Yémen, à Bahreïn, en Libye puis en Syrie. Les soubresauts en Arabie saoudite, en Algérie, au Maroc et en Jordanie furent bien reçus car annonciateurs de changements longtemps attendus. L'émerveillement devant les slogans des révolutionnaires de Place Tahrir fut anéanti par les fatwas des oulémas saoudiens. La fête révolutionnaire fut ensuite assombrie par la guerre en Libye et par les répressions sanglantes à Bahreïn et en Syrie.
Mais chaque changement dans un coin du monde arabe imposait un autre changement dans un autre coin, et, de fil en aiguille, ce livre changeait et épousait les formes de ces changements parfois brutaux, parfois sournois.
Dans les dernières heures où ce livre, déjà achevé et révisé, était sous presse, un événement majeur est venu s'intercaler dans le paysage médiatique mondial avec des répercussions incontestables sur le devenir du monde arabe : l'annonce de la mort du chef d'Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, dans un raid des services spéciaux américains (CIA) contre la villa où il se cachait à Abbottabad, au nord d'Islamabad au Pakistan.
La satisfaction et les scènes de liesses qui ont suivi l'annonce de la mort de Ben Laden laissent un grand nombre d'interrogations et de doutes dans de larges zones d'ombre.